L’excision est une mutilation sexuelle féminine qui consiste à retirer partiellement ou totalement le clitoris et les petites lèvres avec ou sans ablation des grandes lèvres. Il y aurait 54 000 femmes excisées en France. Quels sont les dangers de l’excision ? Quel est son impact sur la sexualité des femmes qui la subissent ? Peut-on réparer les dommages d’une telle mutilation ? Réponses avec Marion Schaefer, déléguée générale de l’association Excision, parlons-en!
On estime que 200 millions de femmes dans le monde sont touchées par les mutilations sexuelles. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) les a regroupées en quatre catégories :
La clitoridectomie, qui est l’ablation partielle ou totale du clitoris.
L’excision, qui est l’ablation partielle ou totale du clitoris et des petites lèvres avec ou sans ablation des grandes lèvres.
L’infibulation qui consiste à rétrécir l’orifice vaginal en coupant une partie des grandes lèvres et en les accolant ou en les recousant. Il ne reste qu’un petit passage pour laisser s’écouler le flux menstruel et les urines.
Toutes les formes non classées de mutilations sexuelles féminines qui portent atteinte à la vulve (percements, étirements, scarifications…).
Ces mutilations sont pratiquées dans au moins 25 pays d’Afrique (Bénin, Burkina Fasso, Cameroun, Mali, Sénégal…), en Indonésie, en Malaisie et au Yémen. Contrairement à ce qui est dit par ceux qui les pratiquent, elles ne sont imposées par aucune religion. Elles s’inscrivent dans des rites traditionnels culturels très anciens et sont réalisées au sein du cercle familial, le plus souvent sur des fillettes.
Ces mutilations reflètent en réalité le fort impact de la domination masculine et patriarcale. A travers ces actes barbares, on prive la femme du plaisir sexuel et on cherche à l’empêcher d’avoir des rapports extra conjugaux ou avant le mariage.
Trois millions de femmes excisées chaque année
Parmi les mutilations citées précédemment, l’excision est la plus fréquente. Trois millions de femmes sont excisées dans le monde chaque année. Cela représente 6 fillettes/femmes excisées par minute
Les dangers de l’excision sur la santé
L’excision et toutes les autres mutilations sexuelles féminines n’ont aucune fin thérapeutique, elles sont toutes nocives. Les dangers pour la santé sont nombreux :
La douleur intense. L’intervention est souvent pratiquée sans anesthésie. Or, le clitoris et la vulve sont des parties du corps très innervées et très sensibles. Parfois, la douleur est telle qu’elle peut provoquer un arrêt cardiaque et donc la mort.
Un risque élevé d’hémorragie. La zone est très vascularisée. Intervenir avec un objet tranchant (couteau, lame de rasoir, morceau de verre) sur cette zone peut provoquer une hémorragie grave pouvant conduire à la mort si elle n’est pas prise en charge par une équipe médicale.
Un risque élevé d’infections graves, lié aux conditions d’hygiène précaires. Toutefois, certains pays médicalisent les mutilations sexuelles pour justifier la mutilation et rassurer les familles. « Les excisions médicalisées sont pires que les autres car elles sont faites avec des instruments extrêmement tranchants et par des spécialistes qui tranchent de façon encore plus profonde que les non spécialistes », fait savoir Marion Schaefer.
Augmentation du risque de contraction d’infections sexuellement transmissibles (IST). L’excision augmente le risque de saignements lors des rapports sexuels et donc de contamination par une IST.
Augmentation du risque de complications obstétricales lors de l’accouchement. Les femmes excisées ont plus souvent des déchirures du périnée pendant l’accouchement et subissent, plus que les autres, des épisiotomies. En effet, si les petites lèvres ont été excisées, elles perdent en élasticité, ce qui complique l’expulsion du nouveau-né. Aussi, le risque de décès périnatal chez les nouveau-nés est plus élevé chez les enfants des femmes ayant subi une mutilation sexuelle que chez les enfants des femmes n’ayant subi aucune mutilation. « Ce sont des femmes à prendre en charge au niveau santé et psychique, le jour de leur accouchement ».
L’impact de l’excision sur la sexualité
L’impact de l’excision sur la sexualité va dépendre de chaque femme. « Certaines femmes vont avoir une sexualité normale quand d’autres vont voir une différence dans leur sexualité après la mutilation ». Il est faux de dire que toutes les femmes excisées n’ont plus de plaisir sexuel. Car ce n’est pas forcément le cas.
Même s’il ne frappe pas toutes les femmes excisées, l’absence de plaisir sexuel lors des rapports est une des conséquences de l’excision. En coupant une partie ou la totalité du clitoris (partie externe), organe du plaisir, on coupe une partie ou complètement le plaisir sexuel. « Le plaisir est quand même possible par le vagin mais plus par la partie externe du clitoris ». Avoir été touchée dans cette zone si intime peut également avoir des répercussions sur la vie sexuelle à l’âge adulte. Les jeunes femmes ne veulent plus être touchées au niveau de leur sexe. Enfin, certaines femmes excisées avouent ressentir des douleurs lors des rapports, même 30 ans après l’excision.
Les conséquences psychologiques de l’excision
L’excision créé un réel traumatisme chez les femmes qui la subissent. Se faire mutiler le sexe par quelqu’un de son entourage (car c’est souvent le cas) est vécue comme une trahison, une violence infligée par une personne en qui on avait confiance. « Le traumatisme est d’autant plus dur que les fillettes pensent se rendre à une grande fête dans une ambiance joviale ». Le risque c’est de ne pas pouvoir donner sa confiance à ses proches, même sa propre famille, à l’âge adulte.
L’excision est le plus souvent réalisée sur des fillettes. Il est fort probable qu’elles ne s’en souviennent pas à l’âge adulte mais la mémoire traumatique peut faire ressurgir des flash-backs de ce moment. Il refait surface alors qu’on pensait l’avoir oublié.
Peut-on réparer les dommages de l’excision ?
Il est aujourd’hui possible de réparer les dommages physiques de l’excision grâce à la clitoridoplastie. Cette technique, mise au point par le Dr Pierre Foldès en 2001 (voir notre interview), consiste à aller chercher la partie interne du clitoris, à la repositionner dans un emplacement anatomiquement normal en libérant les ligaments qui la retiennent et à le ré-innerver. L’opération dure entre 45 minutes et une heure et apporte un bénéfice esthétique et sensoriel. Elle est prise en charge à 100 % par la Sécurité sociale. « Dans la plupart des endroits où l’on répare, il y a une prise en charge globale de la femme, dont psychologique. Certaines femmes qui viennent consulter pour se faire opérer ne passent pas forcément par l’opération car une prise en charge psychologique suffit parfois à guérir leur traumatisme ».
L’excision reste une pratique au Mali alors que ça des nombreux méfaits sur la santé.
crédit photo : allafrica